J’aborde ce thème dans l’essai que je publie dans quelques semaines sur les 20 années d’errements politiques et de gâchis au Togo. Témoignage et vue d’intérieur du dépérissement de l’Etat.
Mais avec les agitations ambiantes dans le marigot “diaspora togolaise”, maladroitement en phase avec les remous post-électoraux en cours au pays, je ne puis m’empêcher de poser ici le problème, dans l’espoir que quelques esprits éclairés permettront de faire un débat productif sur la question. J’assume de nager à contre-courant et j’invite (uniquement) à ce débat ceux qui ne souffrent pas de la « crise de la pensée » que nous avons abordée lors du Colloque de Dakar en 2003. Je compte d’ailleurs organiser un autre colloque prochainement…en terre togolaise, pour nous pencher sur la Cité malade de ses enfants.
Naïvement, depuis 1990, presque tous les mouvements politiques (partis politiques en l’occurrence) au Togo ont cru devoir miser sur les forces des citoyens vivant à l’étranger dans leur stratégie de développement politique. Il s’est développé une relation quasi intime entre des communautés de Togolais en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord notamment et les formations politiques de l’opposition démocratique. Parfois porté par d’anciens acteurs ou sympathisants de ces partis – exilés pour échapper aux répressions du régime rétrograde en place à Lomé – ce militantisme (à la télécommande) a eu des effets divers sur la vie de ces partis. En vérité, le potentiel d’impact de la diaspora togolaise sur la vie politique a été toujours surestimé. La raison en est un fort déficit de culture politique chez la plupart des responsables à l’extérieur. La majorité est passionnée et enthousiaste mais peu « skillé » pour les besoins de la cause…
La caractéristique première de la diaspora togolaise – celle qui est sensible à la chose politique du reste – ce sont les antagonismes récurrents entre des coteries menées par des chefs, eux-mêmes affidés de l’un ou l’autre de la dizaine de leaders qui animaient la vie politique au niveau national. Plusieurs initiatives courageuses (…) ont échoué à cause des jalousies et des trahisons qui en résultaient… Des clans se sont toujours affrontés, souvent pour des broutilles. Et le régime a toujours su en profiter.
A partir de 2002, des alliances stratégiques ont été nouées entre des organisations de la société civile nationale et celles de la diaspora. Celles-ci ont donné des résultats qui ont fait trembler le microcosme politique national, tant le pouvoir en place que l’opposition qui le combattait. L’émoussement de l’engagement citoyen pour le changement trouve sa source dans l’immaturité, l’inconséquence, la faible coordination et parfois le manque de vision et de suivi des acteurs de cette dynamique…Nous sommes aussi comptable de cette situation.
Paradoxalement, il se trouve que la communauté des Togolais de l’extérieur est truffée d’hommes et de femmes de très grande qualité: j’ai rencontré lors de mes voyages un peu partout en Europe, en Amérique du Nord et dans plusieurs pays africains (j’y ai consacré 3 ans), des compatriotes d’une valeur exceptionnelle. Plusieurs parmi eux capitalisent des formations de référence, une expertise sans conteste et une expérience éprouvée dans divers domaines. Tant de talents que le RPT/Faure n’a ni la capacité ni le doigté de rassembler pour diriger le Togo. Tant de talents qui continuent aussi à démontrer son incapacité à créer les conditions réelles du changement au pays…
La forme et la méthode des tentatives d’implication de certains camarades du Canada et des USA dans la mobilisation politique post-électorale actuelle démontrent encore, malheureusement, que les leçons n’ont pas été apprises. Les Togolais de l’extérieur pour être utiles pour quoi que ce soit au pays ont besoin d’un recyclage de fond en comble. Le comprendre maintenant, c’est éviter en 2012, à la suite des municipales et des législatives, qu’on en soit encore à compter les abattis et à téléguider de pauvres militants, prêts à mourir pour une cause hélas dévoyée.
Dany